par fernando » 25 Jan 2017, 17:28
Il est mort. "Conseillère intime" à 5000 balles par mois sur fonds publics...
François Fillon embarrassé par l’emploi de son épouse en tant qu’assistante parlementaire
Le candidat LR à la présidentielle a dénoncé mercredi la misogynie de l’article du Canard Enchaîné. « La séquence des boules puantes est ouverte », a-t-il dit.
LE MONDE | 24.01.2017 à 20h24 • Mis à jour le 25.01.2017 à 11h29 | Par Matthieu Goar
François Fillon aime répéter que l’élection présidentielle se jouera dans les « trois à quatre dernières semaines », lorsque l’opinion passera « au scanner » chacun des candidats. A trois mois du premier tour, le « scanner » vient déjà de révéler une affaire très embarrassante pour lui et sa campagne. Selon Le Canard enchaîné, mercredi 25 janvier, l’ancien premier ministre a employé sa femme, Penelope Fillon, comme assistante parlementaire entre 1998 et 2002, puis six mois en 2012. Elle touchait alors un salaire de 3 900 euros brut mensuels puis de 4 600 euros. Entre 2002 et 2007, elle a aussi été collaboratrice de Marc Joulaud, le suppléant qui a occupé le siège de M. Fillon lorsqu’il est devenu ministre des affaires sociales, puis ministre de l’éducation nationale. Son salaire a alors augmenté, pour atteindre jusqu’à 7 900 euros brut. L’hebdomadaire satirique a calculé que le total perçu pendant toutes ces années a été de 500 000 euros.
Rien d’illégal sur le papier. Les députés disposent en effet d’une enveloppe – 9 561 euros brut actuellement – pour employer jusqu’à cinq personnes. Et ils peuvent embaucher leurs proches, mais seulement à la condition qu’ils travaillent vraiment. Or, selon Le Canard enchaîné, ce n’était pas le cas de Mme Fillon. Le journal cite à l’appui Jeanne Robinson-Behre, une assistante parlementaire censée avoir travaillé avec Mme Fillon, et elle est catégorique : « Je n’ai jamais travaillé avec elle. […] Je ne la connaissais que comme femme de ministre. »
« Elle a toujours travaillé dans l’ombre »
Une version réfutée par l’entourage de M. Fillon. Mardi soir, un message avec les premiers éléments de langage a été envoyé à quelques journalistes. « Mme Fillon a été la collaboratrice de François Fillon. C’est fréquent que les conjoints soient [le] collaborateur, à gauche comme à droite. Elle a toujours travaillé dans l’ombre, ce n’est pas son style de se mettre en avant », pouvait-on y lire. « Elle n’était pas à Paris et faisait un travail en circonscription. Les hommes politiques ont parfois besoin de conseillers intimes, qui ne leur cirent pas les pompes », déclare Benoist Apparu, porte-parole du candidat. Epinglés par Mediapart en 2013 et 2014, Bruno Le Maire et Jean-François Copé s’étaient justifiés de la même façon.
Sauf que Penelope Fillon a elle-même revendiqué à plusieurs reprises n’avoir jamais joué de rôle politique auprès de son mari. Après avoir suivi des études de français, d’anglais, d’allemand et de droit, elle aurait pu être avocate, mais n’a jamais exercé. Dans des entretiens à la presse, elle a souvent assumé son rôle de mère au foyer de cinq enfants. En 2007, dans une interview au journal anglais The Telegraph, elle déclarait ainsi avoir repris des études de littérature anglaise. « J’ai réalisé à un moment que mes enfants ne me connaissaient que comme une mère », expliquait-elle, après s’être décrite comme une « paysanne » préférant « s’asseoir au fond à l’arrière et écouter les autres ». Plus accablant encore, elle déclarait le 21 octobre 2016 dans un reportage réalisé par le quotidien Le Bien public : « Jusqu’à présent, je ne m’étais jamais impliquée dans la vie politique de mon mari ». Elle confiait alors vouloir pour la première fois participer à la campagne de son époux.
Des dégâts politiques potentiellement considérables
Cette affaire est très gênante pour le candidat. En privé, certains de ses proches tentent de rester positifs… en se disant qu’il vaut mieux qu’elle tombe maintenant qu’à une semaine du premier tour. En réalité, François Fillon est dans une phase où il tente de relancer sa campagne. Lundi, il s’est rendu à Berlin pour soigner sa stature internationale et, dimanche 29 janvier, il doit tenir son grand meeting pour rebondir après une longue période pendant laquelle il a subi les attaques de ses adversaires après sa victoire à la primaire, le 27 novembre 2016. Toute la semaine, il va plutôt devoir se justifier sur la réalité de l’emploi de sa femme.
Les dégâts politiques pourraient être considérables. D’abord parce que certains salaires de Mme Fillon paraissent très élevés par rapport à la moyenne des collaborateurs parlementaires. En payant l’épouse du ministre 7 900 euros, M. Joulaud utilisait une très grande partie de sa réserve à ce salaire. « On est dans la fourchette haute », admet seulement M. Apparu. Dans son enquête, Le Canard révèle aussi qu’en 2012 et 2013 Mme Fillon a perçu 100 000 euros comme conseillère littéraire à la Revue des deux mondes, propriété de Marc Ladreit de Lacharrière, homme d’affaires et ami de M. Fillon. Elle y aurait seulement produit trois notes de lecture.
Ces révélations pourraient compliquer la campagne de ce candidat, qui pourfend régulièrement l’assistanat et veut mener une cure d’austérité. Alors qu’il ne cesse de demander des efforts aux Français pour assurer le « redressement national », les soupçons sur l’emploi de sa femme vont brouiller le message. L’image de l’ancien premier ministre pourrait en être affectée. Dans une droite qui a longtemps vécu avec les mises en examen de Nicolas Sarkozy et l’affaire Bygmalion, lui s’est en effet souvent posé comme un homme intègre. Depuis le début de sa campagne, il n’hésite pas non plus à dénoncer le système, « les castes bien établies », comme lors de son discours à Oyonnax (Ain), le 19 janvier. « Il y a une injustice sociale entre ceux qui travaillent dur pour peu et ceux qui ne travaillent pas et reçoivent de l’argent public », avait-il tweeté en septembre 2012. Quelques semaines plus tôt, après les élections législatives de juin 2012, sa femme était officiellement redevenue assistante parlementaire à ses côtés.
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