par fernando » 24 Jan 2018, 17:50
Le LOSC à l'honneur dans les colonnes du Monde...
Y a-t-il encore des gestes élégants en coupe de France ?
Alors que se disputent les 16èmes de finale de la coupe de France les 23, 24 et 25 janvier 2018, il ne fait aucun doute que l’élégance gestuelle des sportifs est au rendez-vous. En revanche, sur le terrain du partage des recettes de billetterie, l’élégance semble devenue une attitude rare. C’est en tous cas ce que l’on a pu lire dans les colonnes de la Presse Quotidienne Régionale (PQR) au lendemain des matchs du précédent tour de la compétition. Dans deux des rencontres (au moins) opposant un club amateur et un club professionnel (Le Mans-Lille et Senlis-Nantes), la part des recettes de billetterie revenant au club professionnel s’est est allée… dans les poches du club professionnel. Pas de quoi fouetter un chat, me direz-vous ! Ce serait oublier la « tradition » du reversement des recettes du club pro au club amateur qui a accueilli la rencontre.
La foule des grands soirs
En coupe de France, un bonus est accordé au club réputé le plus faible : l’avantage de disputer le match « à domicile » (dès lors que les clubs sont séparés par 2 divisions d’écart au moins). Ce bonus est un dispositif favorisant l’équilibre compétitif des rencontres et garantissant une affluence maximale pour les clubs amateurs : alors que le stade d’Epinal fait le plein pour recevoir l’Olympique de Marseille, un match au stade vélodrome entre l’OM et le club vosgien disputé un mardi soir n’aurait certainement pas attiré la foule des grands soirs. Puisqu’il n’y a pas de matchs aller et retour en coupe de France, les recettes de billetterie tirées de l’unique rencontre sont donc supposées être réparties à parts égales entre les deux protagonistes (une fois déduits 25 % au titre des dépenses d’organisation de la rencontre). Mais lorsque la rencontre oppose un club professionnel et un club amateur, il est d’usage que le club professionnel laisse sa part au club amateur : il s’agit souvent de quelques milliers ou dizaines de milliers d’euros, supposément une paille pour des clubs dont le budget se chiffre en dizaines de millions d’euros.
30 000 € pour la location d’un avion privé
Si le Paris Saint Germain (doté d’un budget de plus d’un demi milliard d’euros) a, semble-t-il, l’élégance de ne jamais déroger à cette règle, les clubs du Lille Olympique Sporting Club (LOSC) et du FC Nantes ont refusé de « céder » à la tradition lors des 32èmes de finale de l’édition 2018. La part revenant au FC Nantes à l’issue de son match à Senlis (Oise) était d’environ 14 000 €. Le club ligérien n’a pas souhaité y renoncer, au grand dam de son adversaire, au prétexte qu’il avait déboursé 30 000 € pour la location d’un avion privé. Les 40 000 € empochés pour la qualification couvrent cette dépense, mais le président Waldemar Kita a un stade à détruire, un centre d’entraînement à acquérir et un « Yellopark » à construire. Il n’y a pas de petites économies…
Gomez vs Lopez
Dans le cas du match Le Mans FC-Lille, l’attente du reversement était encore plus grande. Avec 22 000 spectateurs dans un MMArena qui n’avait presque jamais connu telle fête, Thierry Gomez, l’ambitieux et respecté président du Mans FC espérait bien glaner quelques dizaines de milliers d’euros supplémentaires pour asseoir son projet de retour rapide vers les ligues professionnelles : la part allant au LOSC atteignait en effet près de 100 000 €. C’était sans compter sur la situation financière médiocre du club de Gérard Lopez, l’ambitieux et controversé président du LOSC. Interdit de recrutement par la DNCG depuis le 12 décembre 2017, le club nordiste est en zone de turbulences et ne va pas cracher sur ces dizaines de milliers d’euros qui l’aident à régler les salaires du personnel et des joueurs.
Une nouvelle règle de partage
La « tradition » du reversement des recettes du club pro en coupe de France a du souci à se faire. La situation financière des clubs professionnels français reste tendue : l’augmentation des recettes issues des droits de diffusion est largement grignotée par la progression des prix des mutations (les transferts) et des rémunérations des joueurs. Pourtant, cette tradition était un mécanisme tacite de solidarité dans un football français qui en manque tant (en dépit de sa nécessité dans tout secteur économique de spectacle sportif). La Fédération Française de Football va sans doute réfléchir à une nouvelle règle de partage des recettes de billetterie pour les prochaines éditions de la coupe de France. Il faudrait sans doute sortir de la règle du 50-50 entre les protagonistes et définir un partage conditionné par le nombre de divisions d’écart (par exemple 60-40 pour deux divisions d’écart, 70-30 pour trois divisions, 80-20 à partir de 4 divisons d’écart), le cas échéant plafonné. Une telle règle aurait la vertu de clarifier les relations, marquées par une défiance croissante, entre le football des villes et le football des champs.
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