par fernando » 18 Sep 2019, 21:53
Football : requiem pour une Coupe de la Ligue
La LFP a entériné mercredi la disparition de la compétition dès la saison prochaine. Une Coupe mal-aimée, qui n’est jamais parvenue à trouver sa place.
La « coupe en bois » n’est plus. Et la formule de Jean-Michel Aulas, au lendemain de l’élimination de son Olympique lyonnais en quarts de finale, l’an passé, semble une parfaite épitaphe à la Coupe de la Ligue. « C’est quand même une coupe en bois ! Elle gêne tous les clubs et le public n’y adhère pas du tout. » Devant l’impossibilité de trouver un diffuseur l’an prochain, la Ligue de football professionnel (LFP) a sonné le glas, mercredi 18 septembre, de sa compétition, qui disparaîtra dès la saison prochaine.
« Petite finale, petite coupe, petite joie. » Ainsi commençait le compte rendu de la première finale de cette compétition dans nos colonnes, en 1995. Vingt-cinq ans plus tard et alors que le couvercle se referme sur cette Coupe mal née, imaginée en 1994 par Noël Le Graët, alors président de la LFP (il dirige aujourd’hui la Fédération française de football), la description n’a pas pris une ride.
Incapable de s’imposer dans le cœur des Français ou le calendrier et décriée par les clubs, la Coupe de la Ligue n’a jamais trouvé sa place. Et même les joueurs évitent de s’enflammer. « On ne va pas non plus sauter au plafond, ce n’est pas la Coupe du monde », douche le Strasbourgeois Mickaël Pagis en 2005 après avoir soulevé le trophée.
Une Coupe sans « ferveur populaire »
Dès sa naissance, la Coupe de la Ligue n’est qu’une contrepartie. Sa création coïncide avec le passage du championnat de vingt à dix-huit clubs. Une promesse qui ne tiendra que jusqu’à 2002, où la Ligue 1 retrouve vingt équipes. Et à l’image de la panenka ratée du gardien nantais Mickaël Landreau en 2004, offrant le titre à Sochaux, la Coupe de la Ligue conserve, année après année, un fumet d’inachevé.
Délaissée, au point que la Ligue inscrive dans son règlement – à l’article 706 – l’obligation de ne pas aligner que des remplaçants, la compétition a connu plusieurs formules – la dernière, inaugurée en 2009, exempte les clubs qualifiés en Coupe d’Europe du premier tour, et garantit aux quatre premiers du précédent championnat de ne pas se croiser avant les demi-finales. Autant de tentatives d’insuffler une âme à une Coupe « en manque de ferveur populaire », selon le président de Guingamp, Bertrand Desplat, en 2013.
Mercredi, la LFP a tenté une dernière fois de sauver la mise à son trophée doré, dessiné en 2002 par l’artiste Pablo Reinoso. Après l’échec à trouver un diffuseur, deux projets de réforme étaient sur la table. Le premier prévoyait de réunir les huit meilleures équipes de la saison précédente dans une compétition qui se tiendrait durant la période de fêtes de fin d’année – un format évoquant la nouvelle peau de la Coupe Davis, en tennis. Et le second imaginait la création de quatre poules géographiques (nord, sud, est, ouest), en préalable à des quarts de finale. Aucune de ces hypothèses, à en croire L’Equipe, n’a convaincu le conseil d’administration de la LFP, qui a abaissé la guillotine.
Vingt-cinq ans d’existence
Au fil des ans, la « Coupe Moustache », surnommée ainsi en raison de l’attachement immuable de l’ex-patron de la Ligue à l’attribut pileux fourni, Frédéric Thiriez, à défendre la compétition, a peiné à s’imposer dans le paysage hexagonal. Au mieux, elle sert de lot de consolation permettant aux grands clubs de sauver la face après une saison ratée en « étoffant un palmarès sans l’enjoliver ». Le PSG et ses huit trophées en savent quelque chose. Autre utilité : elle a permis à des clubs historiques de mettre fin aux années de vache maigre – comme Marseille, en 2010, et Saint-Etienne en 2013.
Sans jamais acquérir la légitimité ou la patine de la plus que centenaire Coupe de France, la Coupe de la Ligue a participé de la dévaluation de cette dernière dans la hiérarchie du football hexagonal. Seule compétition à laquelle participent tous les clubs de France, la Coupe de France a peiné à maintenir sa place – et ses sponsors – avec la multiplication des rencontres.
Déjà malade, boudé par le public et les téléspectateurs, le patient Coupe de la Ligue a été placé sous assistance respiratoire à l’automne 2018 en se voyant accoler un lucratif naming avec une entreprise indienne « leader mondial du pneu » pour engins de chantier. Loin de démontrer « l’attractivité grandissante » de la Coupe de la Ligue, selon la formule à l’époque du patron de la LFP, Didier Quillot, ce sponsor de niche a incarné son effacement à venir.
La Coupe de la Ligue s’évaporera au terme de l’édition 2019-2020 – avec l’éventualité pour la LFP de « relancer cette compétition ultérieurement » –, mais elle pourra toujours se targuer d’avoir tenu plus longtemps que ses homologues allemande (de 1997 à 2007) ou espagnole (de 1982 à 1986). Quant à cette ultime édition, peut-être que l’idée d’être le dernier de l’histoire à soulever le trophée doré ravivera l’intérêt des clubs, des joueurs et du public. Un dernier inventaire disputé avant liquidation.
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