par manulosc » 25 Mars 2016, 12:28
La chaîne Numéro 23 pourrait bien s'arrêter
Numéro 23 sera bientôt fixée sur son sort. Le 14 octobre, le CSA (Conseil supérieur de l'audiovisuel) avait décidé de retirer sa fréquence à la chaîne TNT. Celle-ci a fait appel devant le Conseil d'Etat, qui se prononcera d'ici fin mars
Vendredi 25 mars, la haute juridiction va consacrer une audience à ce recours. A cette occasion, le rapporteur public Laurence Marion va donner son avis, qui est suivi dans la majorité des cas par la haute juridiction. Selon Le Monde, le rapporteur public va proposer de rejeter le recours de Numéro 23, et donc de confirmer l'arrêt de la chaîne.
Un cas qui fera jurisprudence
Rappelons que la loi permet au CSA de retirer une autorisation d'émettre "en cas de modification substantielle des données au vu desquelles l'autorisation d'émettre avait été délivrée, notamment des changements intervenus dans la composition du capital". Mais, jusqu'à présent, cette arme fatale avait été utilisée uniquement pour des radios locales. Le cas Numéro 23 présente donc un caractère inédit, et fera jurisprudence. En l'espèce, le CSA est bien d'avis qu'"une modification substantielle" a eu lieu.
Accord avec un russe
Précisément, les reproches du CSA portent sur les relations entre Numéro 23 et un de ses actionnaires, United TV Holding (UTH), filiale du groupe USM du russe Alicher Ousmanov. En octobre 2013, Numéro 23 a cédé 10% de son capital à UTH pour 10 millions d'euros. A cette occasion, un pacte d'actionnaires a été signé, qui accordait une série de droits à UTH, notamment la possibilité de revendre ses parts -ce que les financiers appellent dans leur jargon une clause de liquidité. Précisément, cette clause fixe comme objectif de revendre Numéro 23 dans le courant de l'année 2015. Et c'est effectivement ce qui se passera. En avril dernier, Numéro 23 a signé un accord pour être racheté pour 88 millions d'euros par NextRadioTV, qui possède BFM TV et ce site web.
Conclusion du CSA: "la signature d'un pacte d'actionnaire contenant une clause de vente et stipulée moins d'un an et demi après la délivrance de l'autorisation, et la demande de cession de la totalité du capital en avril 2015 constituent, ensemble, une modification substantielle".
Quotas de films français
A noter que le CSA formule aussi d'autres reproches à Numéro 23. Toutefois, aucun d'entre eux ne sont suffisants sur un plan juridique pour motiver un retrait de la fréquence.
Ainsi, le CSA reproche à Numéro 23 de ne pas avoir "exécuté plusieurs de ses obligations" -en pratique, la chaîne TNT n'a pas respecté en 2013 et 2014 ses quotas de diffusion de films français et européens.
Autre reproche: le pacte d'actionnaires avec UTH n'a été communiqué au CSA qu'en mai 2015, et "après plusieurs relances". Dès lors, l'entrée au capital du russe aurait "été dissimulée dans toute sa portée au CSA".
Surtout, le CSA accuse Pascal Houzelot (qui détient 72,25% de Numéro 23) d'"avoir, dès mai 2013, cherché avant tout à valoriser à son profit la fréquence dont bénéficiait Numéro 23, et ce dans la seule perspective d'une cession du capital à un nouvel actionnaire avant fin 2015. Une telle démarche constitue un abus de droit à caractère frauduleux".
Recours déposé trop tard
Enfin, le CSA estime que les droits accordés à UTH accordent au russe un contrôle conjoint avec Pascal Houzelot. Et qu'un tel contrôle conjoint aurait dû être approuvé par le CSA. Toutefois, ce point est contesté par Régis Fraisse, un conseiller d'Etat choisi par le CSA comme rapporteur indépendant pour instruire cette affaire. Dans un rapport rendu le 9 juillet, Régis Fraisse a en effet estimé qu'il n'y avait pas de contrôle conjoint.
Enfin et non des moindres, le CSA estime que le recours de Numéro 23 n'est pas valable car déposé trop tard.