krouw2 a écrit:m'en branle des chrétiens
Toi, t'es pas militant LR à 100% de 100%
Avec Wauqiuez et Sens Commun, sont pas sortis de l'auberge. Comme fond de commerce il ne va leur rester que les vieux réacs qui sont venus soutenir Fillon au Trocadéro.
LR: qui a peur de rompre avec Sens commun?
23 octobre 2017| Par Lucie Delaporte
Après les fracassantes déclarations de Christophe Billan faisant de la « chrétienté » la condition de la nationalité française, certains dirigeants de LR demandent son exclusion. Le bureau politique qui se tient ce mardi a mis à l’ordre du jour le sujet, qui embarrasse la plupart des ténors du parti.
Pour certains, le réveil est difficile. Avec retard et beaucoup d’embarras, Les Républicains commencent enfin à prendre la mesure du risque que fait courir le mouvement Sens commun à leur parti.
Dix jours après la publication des propos du président de Sens commun Christophe Billan expliquant, non seulement qu’il souhaitait tendre la main à Marion Maréchal-Le Pen, mais également, dans la version non expurgée de l’entretien à L’Incorrect que nous avions publiée, qu’on ne pouvait pas être français sans être chrétien « culturellement ou spirituellement », le malaise est profond.
« Je suis tombé des nues en lisant ça. J’ai eu l’impression de lire un tract du FN », affirme Maël de Calan, candidat à la présidence de LR proche d’Alain Juppé, qui a, depuis, lancé une pétition pour demander l’exclusion de Christophe Billan 3.
« Les Républicains ont une charte des valeurs depuis 2002 qui est extrêmement cohérente et qui a le mérite d’être claire. Si on est en contradiction avec ces valeurs, on n’a pas sa place à LR. » Outre la manière dont le président de Sens commun détaillait dans la vidéo de L’Incorrect sa stratégie d’entrisme à LR, le passage concernant la « chrétienté », condition pour être français, a particulièrement choqué. « C’est vraiment lunaire. Ce monsieur n’a pas compris quel était le sens de la nationalité en général et pour la droite républicaine en particulier. » Autre candidat à la présidence de LR, Daniel Fasquelle a envoyé un courrier à Bernard Accoyer pour demander que le parti rompe son lien avec le mouvement. « Depuis que j’ai découvert la deuxième partie de ces déclarations, en contradiction totale avec nos valeurs républicaines, je pense qu’il n’y a plus à se poser de questions. J’ai demandé qu’on mette fin à la convention qui nous lie avec ce mouvement », tonne le député du Pas-de-Calais.
Déjà englué dans la tragi-comédie de l’exclusion des “Constructifs” – une question qui, depuis le mois de juin, n’est pas encore tranchée – LR se serait bien passé de cette nouvelle crise. Pour ne pas laisser l’impression d’un parti complètement inerte, la question de la place de Sens commun a bien été inscrite à l’ordre du jour du prochain bureau politique qui doit se tenir ce mardi. Selon nos informations, aucune décision définitive ne devrait néanmoins être prise, tant le sujet gêne les Républicains.
La plupart des ténors de la droite sont d'ailleurs restés d’une grande discrétion ces derniers jours. Laurent Wauquiez s’en est tenu à une simple demande de « clarification » adressée à Sens commun. Florence Portelli, porte-parole de François Fillon lors de la campagne présidentielle et aujourd’hui candidate à la présidente de LR, n’a quant à elle toujours pas réagi aux derniers propos de Christophe Billan, se contentant de rappeler qu’aucune alliance avec le FN n’était envisageable. Que Sens commun assimile la nationalité à la chrétienté, ou qu’il appelle à plus de « féodalité » dans l’organisation du parti (lire ici), ne l’a manifestement pas troublée. Contactée à de multiples reprises sur le sujet, elle n’a pas répondu à Mediapart.
Elle aussi très prudente, Valérie Pécresse nous a répondu par le biais de son entourage qu’il y avait deux lignes rouges à ne pas franchir : « Aucun accord avec les dirigeants du Front national y compris avec ceux qui ont porté ses idées, comme Marion Maréchal-Le Pen [aujourd’hui retirée de la vie politique – ndlr] et un strict respect de la laïcité. » Rien de plus. « Un parti qui veut exclure les “Constructifs” et ne veut rien faire concernant Christophe Billan, c’est un parti qui fait un vrai choix idéologique. C’est une dérive », expliquait pour sa part au JDD Xavier Bertrand 3, un des rares, avec Christian Estrosi, à être montés au créneau ces derniers jours.
Le silence de nombre de dirigeants de la droite après les fracassantes déclarations du président de Sens commun illustre bien le poids qu’a pris le mouvement au fil des années au sein de LR. « Désormais, nous sommes des acteurs majeurs du parti […]. La force de Sens commun, c’est que les derniers militants de droite, c’est chez nous. Il n’y a plus de militants à droite », plastronnait Christophe Billan dans la vidéo de L’Incorrect, n’hésitant pas à poser des ultimatums aux candidats à la présidence du parti. « L’idée, c’est de leur dire : vous avez devant vous quelques mois pour revoir doctrinalement ce qu’est la droite et mettre en place un nouvel appareil », détaillait-il en expliquant que s’il n’obtenait pas gain de cause, son mouvement claquerait la porte.
« Si Sens commun s’en va, il ne va plus rester grand monde à LR », n’a pas manqué de railler le député Thierry Solère, chef de file des “Constructifs” à l’Assemblée nationale.
À droite, on l’admet volontiers : après l’immense succès de la Manif pour tous en 2013, chacun s’est demandé comment capter cette puissante vague de protestation qui avait émergé loin des partis. « À l’époque, raconte un cadre de LR, on se disait que Sens commun était plutôt la version modérée de la Manif pour tous. La direction de LR a facilité leur entrée avec l’idée de faire grossir les rangs du parti. » Aujourd’hui, certains se demandent si la manœuvre était si judicieuse. D’autant, poursuit le même cadre, que « l’entrisme de Sens commun est une stratégie délibérée, assumée depuis longtemps ».
Au lendemain des grands défilés contre la loi Taubira, LR a mis en place un accord signé en juin 2014 afin qu’une adhésion à Sens commun vaille adhésion aux Républicains. Peu à peu, leurs militants ont gagné du terrain dans les fédérations. L’efficacité militante du mouvement sur le terrain a rapidement bluffé. Alors que la campagne de François Fillon prenait l’eau de toute part, l’opération de mobilisation express place du Trocadéro, orchestrée par le mouvement, a tourné à la démonstration de force.
« Il faut rapidement enlever la mauvaise herbe »
Toutefois, certains à droite jugent que le poids réel de l’organisation est largement surestimé.
« Ils adorent se pousser du col et se la jouer société secrète à la manière des Cigares du pharaon. Mais ils ont en réalité très peu d’élus », affirme un dirigeant. « Le jour où nous couperons le lien avec ce mouvement, Sens commun n’aura plus aucune importance et deviendra un satellite de l’extrême droite », pronostique même Daniel Fasquelle. Alors que LR est déjà au tapis depuis l’OPA de Macron, beaucoup jugent en tout cas que le moment est mal choisi pour se passer de cette base militante. « M. Billan n’est pas propriétaire de ses militants dont je ne suis pas sûr que tous se retrouvent dans ses déclarations. » Il les invite donc à quitter l’organisation et à rejoindre le parti.
À LR, un cadre s’interroge en off : « Si on se coupe déjà le bras “centre-droit” en excluant les “Constructifs”, puis le bras “droite-droite” en excluant Sens commun, qu’est-ce qui va nous rester ? »
Les pudeurs de certains ténors de LR, à commencer par le grand favori pour prendre la présidence du parti en décembre, Laurent Wauquiez, s’expliquent sans doute par l'importance prise par Sens commun et ses associations satellites dans certains exécutifs locaux. Conformément à sa stratégie d’entrisme « par le bas », détaillée dans cette vidéo, le mouvement ultraconservateur est effectivement devenu incontournable dans certaines régions.
Laurent Wauquiez est sans doute celui qui a donné dans sa région le plus de gages à ce mouvement. Pendant la campagne des régionales de 2015, la pasionaria de la Manif pour tous à Lyon, devenue coordonnatrice de Sens commun, Anne Lorne, figurait en bonne place sur la liste de Wauquiez. Elle avait d’ailleurs annoncé la couleur sur Twitter en cas de victoire : « Les premiers à voir leurs subventions sauter [seraient] LGBT et SOS Racisme. » Visiblement, Laurent Wauquiez a obtempéré puisqu’à peine arrivé en responsabilité, il a coupé les subventions de ces associations (lire ici notre enquête). Cette proche de Charles Millon, mis au ban de la droite classique pour avoir fait alliance avec le FN, a également créé avec lui le collectif Phoenix pour peser sur le débat à droite. Un collectif qui a aujourd’hui rejoint l’Avant-Garde, qui théorise l’union des droites, de LR au Front national.
Fin septembre, la commission des affaires internationales de la Région Auvergne-Rhône-Alpes auditionnait un curieux personnage de la nébuleuse Manif pour tous. Le président de SOS Chrétien d’Orient, Charles de Meyer, ex-attaché parlementaire du député d’extrême droite Jacques Bompard et proche de l’Action française, est reparti avec la promesse d’un chèque de 50 000 euros de la Région pour sa cause. « La référence à une “culture partagée” comme justification de cette aide faite par le vice-président Meunier est une insulte à la France multiculturelle et un boulevard pour l’extrême droite », s’est indigné le groupe d’opposition RCES (Rassemblement citoyen, écologiste et solidaire).
Alors que Charles Millon faisait récemment l’éloge des écoles « Espérance banlieue », où les élèves évoluent dans une discipline quasi militaire, les décrivant comme des vecteurs pour faire avancer leurs idées sur le terrain, Laurent Wauquiez a accordé avant l'été 250 000 euros à cet établissement hors contrat proche des catholiques traditionalistes.
Valérie Pécresse, qui s’oppose souvent aux discours de Laurent Wauquiez braconnant sur les terres de l’extrême droite, a elle aussi fait bonne place aux responsables de Sens commun en Île-de France. La fondatrice des « mères veilleuses », collectif exigeant l’abrogation de la loi Taubira, Caroline Carmantrand, figure du mouvement Sens commun dans les Hauts-de-Seine, a ainsi été nommée en février 2016 présidente de la commission chargée de la famille et de l'action. Selon L’Humanité 3, la conseillère régionale, adjointe à la mairie d’Asnières, s’était fait connaître en entonnant des chants religieux en plein conseil municipal pour protester contre la loi Taubira. Arnaud Le Clere, vice-président de Sens commun, est également conseiller régional d’Île-de-France.
Après quelques atermoiements, les subventions aux associations de lutte contre l’homophobie ont été maintenues mais le soutien au Pass’ contraception, grâce auquel les lycéennes pouvaient bénéficier d'un accès gratuit à la contraception, a en revanche été supprimé, comme en Auvergne-Rhône-Alpes. « Le Pass' contraception n'était plus distribué par la région depuis 2013, il ne marchait pas », précise l'entourage de Valérie Pécresse qui dénonce une polémique artificielle.
Les études sur le genre, que la région finançait au travers de bourses de recherche jusqu’en 2016, ne touchent plus désormais un sou du conseil régional, comme l’avait révélé Libération 3. Le « genre » ne figure plus dans la liste des « domaines d’intérêt majeur » de l’exécutif régional. Difficile de ne pas y voir une concession à Sens commun, obsédé par la prétendue propagation de la « théorie du genre » en France. Autre marqueur de taille, la Région aide désormais de la même manière les lycées publics et les lycées privés, pour l’immense majorité catholiques.
Président du groupe LR au Sénat, et président jusqu’à fin septembre de la Région Pays de la Loire (poste qu’il a dû quitter en raison de la loi sur le non-cumul des mandats), Bruno Retailleau a aussi fait une bonne place aux dirigeants de Sens commun. Comme Laurent Wauquiez, celui qui compte trois élus Sens commun dans son exécutif régional a retiré leurs subventions à des associations LGBT telles que Cinépride à Nantes ou Homogène au Mans. Cet amateur de crèches de Noël a, lui aussi, voté un rattrapage des sommes allouées aux lycées privés. Près de 60 millions d’euros ont ainsi été attribués à ces lycées pour « réévaluer leurs moyens de fonctionnement » mais aussi « accompagner leurs projets d’investissements ». Le programme, une fois de plus, de l’organisation issue de la Manif pour tous…
« Il faut rapidement enlever la mauvaise herbe pour que notre famille reparte sur des bases saines », affirme Daniel Fasquelle. Dans son parti, certains craignent qu'il ne soit, déjà, un peu tard.
"L'alcool tue lentement. On s'en fout, on a le temps."