par une des fakes de Der » 20 Fév 2013, 18:20
Goodyear : Montebourg va répondre à la lettre du PDG de Titan
Dans une lettre virulente adressée au ministre du redressement productif, Arnaud Montebourg, et publiée par le site des Echos, Maurice "Morry" Taylor Jr, le PDG du groupe américain Titan international, explique les raisons qui l'ont poussé à se retirer du projet de reprise de l'usine Goodyear à Amiens-Nord.
Alors qu'Arnaud Montebourg avait évoqué pudiquement une sortie de Titan de la table des négociations, le courrier du PDG du fabricant de pneumatiques pour véhicules agricoles est bien plus direct. Maurice M. Taylor Jr fustige à la fois les méthodes de production françaises, jugées trop peu efficaces, mais aussi l'arrogance du gouvernement. Extraits.
"J'ai visité cette usine à plusieurs reprises. Les salariés français touchent des salaires élevés mais ne travaillent que trois heures. Ils ont une heure pour leurs pauses et leur déjeuner, discutent pendant trois heures et travaillent trois heures. Je l'ai dit en face aux syndicalistes français. Ils m'ont répondu que c'était comme ça en France ! Monsieur, votre lettre fait état de votre envie d'ouvrir des discussions avec Titan. Vous pensez que nous sommes si stupides que ça ? Titan possède l'argent et le savoir-faire pour produire des pneus. Qu'est-ce que possède le syndicat fou ? Il a le gouvernement français. Le fermier français veut des pneus à bon prix. Il se fiche de savoir si les pneus viennent de Chine ou d'Inde, et si ces pneus sont subventionnés. Titan va acheter un fabricant de pneus chinois ou indien, payer moins de 1 euro l'heure de salaire et exporter tous les pneus dont la France a besoin. Dans cinq ans, Michelin ne pourra plus produire de pneus en France. Vous pouvez garder les soi-disant ouvriers. Titan n'est pas intéressé par l'usine d'Amiens-Nord".
L'homme est coutumier de ce type de coups de gueule : cet ancien candidat républicain à l'investiture en 1996 a régulièrement défendu le "made in USA" dans des vidéos publicitaires au ton franchement chauvin, voire légèrement raciste. Mercredi, il a assumé "une lettre qui n'est pas une lettre toute rose, n'est pas une lettre à ma petite amie, on parle d'affaires". "Nous sommes ceux qui avons le carnet de chèque et vous nous dites que nous devons d'abord rencontrer les syndicats? (...). Vous êtes dingues", a-t-il répété. "Bientôt, en France (il n'y aura plus d'emplois) et tout le monde passera la journée assis dans les cafés à boire du vin rouge", a-t-il conclu.
MONTEBOURG : "IL VA AVOIR UNE RÉPONSE"
Interrogé mercredi, Arnaud Montebourg a rebondi sur l'affaire : "Il va avoir une réponse, ne vous inquiétez pas ! Par écrit, c'est mieux", a-t-il promis. Najat Vallaud-Belkacem, la porte-parole du gouvernement, a affirmé qu'il n'y avait "pas lieu de faire de surenchère". "Je veux conserver comme règle de conduite en la matière le respect, le silence, a-t-elle déclaré. A un bémol près. Je rappellerai quand même à M. Taylor que la France reste le premier pays destinataire des investissements américains en Europe, et il y a sans doute de très bonnes raisons à cela."
Le délégué CGT de Goodyear à Amiens-Nord, Mickaël Wamen, a dénoncé une "lettre insultante". "Elle nous conforte dans le fait que nous avons eu raison d'agir ainsi", a-t-il estimé. Le secrétaire général de la CGT, Bernard Thibault, a affirmé que cette lettre était "une insulte non seulement aux ouvriers" mais à "la démocratie".
"UN PROJET QUI N'EXISTAIT PAS"
Goodyear a annoncé à la fin de janvier que l'usine d'Amiens-Nord allait fermer, menaçant 1 173 postes, affirmant que cette fermeture était "la seule option possible après cinq années de négociations infructueuses". Cette annonce a provoqué un tollé politique en France, où plusieurs sites industriels sont promis à la fermeture, ce qui met le gouvernement en difficulté. Le prochain comité central d'entreprise se tiendra le 7 mars au siège du groupe, à Rueil-Malmaison. La CGT a appelé les salariés du groupe à manifester ce jour-là.
Lors d'une manifestation, le 12 février, devant le siège de Goodyear, Mickaël Wamen avait annoncé son intention de faire condamner Titan pour avoir "soutenu un projet qui n'existait pas" et pour être responsable du coprojet de fermeture du site.
Depuis le refus par la CGT (majoritaire) il y a cinq ans de signer un accord sur la compétitivité dans l'usine Goodyear (contrairement à sa voisine Dunlop), les salariés de Goodyear sont dans l'impasse. Les commandes s'étant raréfiées depuis, pour les ouvriers de la filière tourisme il n'y a parfois que deux heures de travail par jour, une situation absurde dénoncée par les syndicalistes de l'usine.