par fernando » 01 Nov 2015, 19:54
La Sarkozie, c'est comme même hors concours niveau crapulerie sous la Vème république
Patrick Balkany affirme avoir bénéficié sous Sarkozy d'une « transaction » avec le fisc
D'après ses propres écrits, Patrick Balkany a bénéficié en 2008 d'une « transaction » avec le fisc, alors qu'Éric Woerth était ministre du budget. L'élu avait été lourdement redressé sur son impôt sur le revenu à la fin des années 1990.
Ce 15 février 2008, Nicolas Sarkozy annonce en fanfare le rétablissement de « l'instruction civique et morale » à l'école. « Pour les plus grands, ce programme présentera les règles élémentaires d’organisation de la vie publique et de la démocratie : le refus des discriminations de toute nature, l’élaboration de la loi et son exécution, les enjeux de la solidarité nationale... », pérore le chef de l'Etat devant les caméras. Au même moment, son grand ami Patrick Balkany, si l'on en croit ses propres écrits, est en train de signer une « transaction » confidentielle avec Bercy, qui fait fondre le montant du redressement fiscal qu'il traîne depuis des années. Alors qu'Eric Woerth est ministre du budget chargé de l'assainissement des finances publiques, les leçons sur la solidarité nationale semblent avoir été, ce jour-là, négligées.
Couverte par le secret fiscal, cette « transaction » n'a jamais été rendue publique jusqu'ici, pas plus que le redressement en question, relatif à l'impôt sur le revenu de Patrick Balkany des années 1986 à 1995, soldé seulement en 2008 après onze ans de contestation.
Si Mediapart a découvert l'existence de ce « casier fiscal », c'est que le député et maire de Levallois-Perret y fait lui-même référence dans un courrier récemment adressé à Bercy, dans lequel il conteste l'évaluation en cours de son patrimoine et le nouveau redressement qui lui pend au nez.
Dans cette lettre officielle datée de février 2015, l'élu dévoile d'abord l'existence d'un redressement fiscal portant sur son impôt sur le revenu des années 1986 à 1995 (sans pour autant le chiffrer), puis affirme noir sur blanc que « le montant a été ramené à la somme forfaitaire et définitive de 504.196,63 euros à l'occasion de la signature de la transaction du 15 février 2008 ». Cette phrase est une petite bombe.
Qui a signé cette transaction à Bercy ? Sur quelle base ? Quelle est l'ampleur de la ristourne ? Quel rôle ont joué Eric Woerth et la fameuse « cellule fiscale » chargée au sein de son cabinet de traiter certains dossiers de personnalités, d'élus ou d'entreprises (comme Bernard Tapie ou le photographe François-Marie Banier, ami de Liliane Bettencourt) ? En 2010, le successeur d'Eric Woerth, François Baroin, avait d'ailleurs décidé la suppression pure et simple de cette « cellule fiscale », dont l'« existence même nourrissait la suspicion » (selon un rapport de l'inspection générale des finances).
Sollicité par Mediapart, l'avocat de Patrick Balkany n'a pas souhaité apporter la moindre explication sur cet épisode de 2008. « Je ne connais rien de la transaction que vous évoquez, ni même si elle existe, nous a répondu Me Grégoire Lafarge. Il suffit. »
Quant à Eric Woerth, il a prié sa chargée de communication de nous renvoyer vers la Direction générale des finances publiques à Bercy... guère plus bavarde. « Le secret fiscal (et la procédure judiciaire en cours) ne permettent pas à la Dgfip de répondre sur ce dossier particulier », nous a fait savoir cette direction centrale, qui pilote toutes les vérifications fiscales. Pour l'heure, faute de connaître le montant du redressement notifié en 1996 à Patrick Balkany, il s'avère impossible de jauger la ristourne concédée en 2008.
En attendant, Mediapart a tout de même réussi à en savoir plus sur les causes du redressement lui-même, assorti de pénalités pour mauvaise foi. A l'époque, Bercy tirait les conséquences de contrôles opérés par la Chambre régionale des comptes sur la gestion de Levallois-Perret et de la condamnation pénale pour « prise illégale d'intérêts » de Patrick Balkany survenue en 1996 (en l'occurrence pour avoir employé dans son manoir de Giverny trois agents de la ville réquisitionnés pour entretenir son parc, faire la cuisine ou le ménage).
Un premier redressement lui a été notifié le 20 décembre 1996 par la Direction nationale des vérifications de situations fiscales (Dnvsf), un second en septembre 1997. Après moult recours, Patrick Balkany a fini par déposer une requête devant la justice administrative en juillet 2002, afin de réclamer une « décharge » des cotisations comme des pénalités. Mais d'après un jugement définitif du 24 octobre 2007, que Mediapart a récupéré, le tribunal administratif de Paris semble avoir donné raison au fisc sur tous les points.
A la lecture de la décision, on comprend que les services de Bercy ont déniché en 1996 au moins trois raisons de rectifier l'impôt sur le revenu de l'élu :
• ils ont considéré l'emploi d'agents municipaux à son domicile privé (entre 1986 et 1995) comme un « avantage en nature », que Patrick Balkany aurait dû déclarer.
• ils ont observé qu'entre 1993 et 1995, l'élu « avait bénéficié de la mise à disposition de deux véhicules » de la Semarelp (la société d'économie mixte de Levallois qui lui sert de bras armé immobilier), y compris « les fins de semaine en-dehors de la région Ile-de-France ». « Si M. Balkany fait valoir (…) qu'il était fréquent que les chauffeurs de la société lui apportent des plis urgents durant les week-ends, ces circonstances ne suffisent pas » à l'exonérer d'une imposition sur ces « avantages en nature », note le tribunal.
• ils ont enfin estimé que des cadeaux et frais de voyages au Canada ou en Chine, acquittés par la Semarelp et une seconde société, devaient être regardés comme des revenus imposables. « Si M. Balkany soutient qu'un voyage (en Chine) s'inscrivait dans un projet de jumelage avec la ville de Tian Jin (...), aucun document n'a été produit pour l'attester », souligne le tribunal.
Surtout, celui-ci a bien acté que l'administration fiscale avait eu raison d'assortir son redressement de pénalités de mauvaise foi (« L'administration (…) rapporte la preuve, qui lui incombe, de l'absence de bonne foi de l'intéressé »). En clair, la justice a validé en octobre 2007 une décision du fisc qu'une transaction mystère semble avoir « corrigée » quatre mois plus tard.
Rappelons qu'à l'époque, en parallèle de ses arriérés d'impôt sur le revenu, Patrick Balkany traînait une seconde dette vis-à-vis du Trésor public. Il avait en effet été condamné en 1999 par la chambre régionale des comptes d'Ile-de-France à rembourser 523 897 euros à la ville de Levallois-Perret (soit l'équivalent des salaires des trois agents détournés à son usage personnel), plus 232 310 euros d'intérêts (voir ici et là nos articles sur ce sujet).
Après une salve de recours, il a daigné régler les 523 897 euros, mais sollicité en 2006 une « remise gracieuse » sur les intérêts auprès du ministre de l'Economie. Au moment où il décroche sa transaction sur le redressement fiscal, en février 2008, cette demande de « remise gracieuse » est toujours en attente. Les espoirs de Patrick Balkany seront définitivement douchés en 2014, grâce à une décision du conseil d'Etat. Il aura fallu quinze ans pour que le droit s'impose, sur ce point, à l'élu de Levallois.
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